Jeunes témoins engagés – Série #08


Bonjour, je m’appelle Corentin, j’ai 23 ans et j’ai été envoyé par Inigo en mission de solidarité internationale à
Athènes en Grèce, pour une durée d’un an. Je viens tout juste de dépasser la moitié de ma mission. Vers la fin de
mon master dans une école de cinéma Belge, ne sachant pas trop quoi décider concernant ma vie professionnelle,
j’ai décidé de chercher un projet de volontariat qui pourrait se faire sur quelques mois. Après m’être pas mal
renseigné sur les différents aspects du départ en mission, j’ai finalement pris la décision de partir un an (malgré ma
réticence pour la longue durée) au sein du Service d’aide Jésuites pour les Réfugiés (JRS). Pour être proche de la
population que l’on aide quotidiennement, on vit dans un des quartiers les plus pauvres d’Athènes. C’était donc un
choc au moment d’arriver, car la ville est vraiment très sale. Les rues puent, sont remplies de déchets, et le silence
est devenu quelque chose d’extrêmement rare, même au milieu de la nuit. C’était vraiment pas facile au début,
même si désormais je m’y suis habitué.


Au sein de JRS nous avons différents projets. Tout d’abord, nous tenons un free-shop chaque jour de la semaine, où
nous récoltons des vêtements afin de les redistribuer aux réfugiés et aux demandeurs d’asiles. Le système fonctionne
avec des rendez-vous via WhatsApp. Ensuite, nous (les volontaires) donnons dans un centre, des cours à ceux qui
souhaitent apprendre une nouvelle langue, parfois en vue d’aller vivre dans un pays spécifique. Les cours disponibles
à JRS sont des cours d’anglais, de grec, de français et d’allemand. Pour ma part je donne des cours d’anglais à
quelques adolescents, deux fois par semaine. Notre troisième projet consiste à faire de l’animation avec les enfants
(qui sont pour la majorité Afghans). Pas loin de notre lieu de vie se trouvent une place, appelée Viktoria Square où la
communauté Afghane se retrouve en journée, n’ayant pas vraiment d’autre choix que d’attendre l’acquisition de
leurs papiers (qui peut prendre parfois plusieurs années). Les enfants sont donc souvent livrés à eux-mêmes dès leur
plus jeune âge. On y va donc entre deux et trois fois par semaine avec des ballons de foot, des cordes à sauter, de la
peinture ou du dessin afin de passer du temps rien qu’avec eux, sur le sol poussiéreux du Square. À défaut de pouvoir
les aider financièrement, on se rend disponible pour tenter de faire un peu oublier la douleur du quotidien de ces
enfants. Enfin, le dernier projet se trouve au sein même de la communauté des jésuites (où je suis hébergé durant
toute la durée de ma mission) à savoir : Le Woman Day Center. C’est un centre de jour pour les femmes et les enfants,
où nous organisons des ateliers pour les femmes, et où nous proposons différents services comme des rendez-vous
avec une assistante sociale, des machines à laver ou encore des douches, le tout gratuitement (évidemment).

À 6 mois de mission, je sens que mon expérience ici m’a déjà énormément changé, fait évoluer et grandir sur bien
des aspects. Être en contact avec une réalité aussi difficile m’a permis de me rendre compte de la chance que j’ai de
vivre en Belgique et dans un pays qui n’est pas en guerre, ou qui ne connaît pas la famine. Je me suis aussi rendu
compte de l’importance de m’investir en qualité et non en quantité dans les projets. En effet, travailler avec des
réfugiés c’est accepter de changer continuellement les plans et ce qui avait été prévu. Ce qui, au final, n’est pas si
grave puisque ça m’a appris à être beaucoup plus flexible et à tout donner même si ce n’est pas ce qui était prévu au
départ. La qualité, non pas la quantité. C’est en fin de compte la manière avec laquelle je vis la chose, la manière avec
laquelle je suis présent pour eux à tel moment qui importe et non pas la quantité de travail que j’aurais fait en amont.
Je sens également que la vie en communauté m’a fait évoluer quant à mon ouverture d’esprit, à force de vivre et
travailler avec des personnes de différentes nationalités, ayant une éducation différente et des valeurs différentes
des miennes. Finalement, je pense que ce projet est un réel projet de vie, qui me changera à tout jamais. J’ai déjà
peur de rentrer et de me rendre compte que je ne suis plus en accord avec tel ou tel point de ma vie d’avant. Mais
bon, ça fait partie de l’expérience.

À très vite !